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REVENU
07.11.2024

Conditions de travail et revenu agricoles : des difficultés mises en lumière par le film « La Ferme des Bertrand »

07.11.2024 -
Mardi soir, une quarantaine de participants sont venus assister à la projection du film La Ferme des Bertrand à Eguzon.
L'occasion d'échanger avec Bruno et Cécile, tous deux éleveurs laitiers à Cléré du Bois et à Eguzon, sur les conditions de travail des agriculteurs, la charge de travail, les solutions pour réduire la pénibilité de son travail et améliorer l'ergonomie et pour se libérer du temps personnel. L'occasion également de revenir sur les difficultés économiques rencontrées par les agriculteurs, pour qui il est souvent difficile de se tirer un revenu suffisant.
 
Des mesures politiques sont possibles pour soutenir le revenu et l'amélioration des conditions de travail des agriculteurs ! Retrouvez notre communiqué ci-dessous !
 
Merci à Bruno et Cécile pour leur témoignage et au public pour leurs échanges.
 
 

Le 5/11/2024

A Eguzon-Chantôme

 

Communiqué de presse

 

Conditions de travail et revenu agricoles : des difficultés mises en lumière par le film « La Ferme des Bertrand »

La Confédération Paysanne de l'Indre organisait ce mardi 5 novembre une projection-débat à Eguzon Chantôme du film « La Ferme des Bertrand ». Ce documentaire nous raconte l'histoire d'une ferme d'élevage de vaches laitières en Haute-Savoie sur plus de cinquante ans et trois générations.

Ce film dépeint avec nuance la réalité quotidienne du travail des agriculteurs. Il montre les journées très chargées et longues quand la météo permet de faire les foins et qu'il n'y a pas de temps à perdre. Il montre la difficulté à construire une vie de famille, avec le portrait de ces trois frères éleveurs restés célibataires par manque de temps personnel pour nouer des relations et par manque d'attractivité de leur rythme et de leur lieu de vie. Il montre l'usure des corps exposés aux gestes répétitifs de la traite, chaque jour, deux fois par jour. Mais il montre aussi des agriculteurs passionnés par leur métier, aimant leur cadre de travail au milieu de la nature, soucieux de préserver et de sauvegarder les paysages qui font tout l'attrait de leur région.

Ce rythme de travail parfois effréné, sans congés, sans weekend, sans temps de repos et de loisir, sans vie de famille, c'est une des raisons de la colère que les agriculteurs expriment depuis l'hiver dernier. Ce rythme est rendu nécessaire par le manque de revenu et la nécessité de faire tourner les fermes coûte que coûte pour assurer sa sécurité économique.

Selon l'INRAE, « entre 2010 et 2022, le résultat courant avant impôts (RCAI) [1] moyen s'élevait à 32 000 € par équivalent temps plein (ETP) non salarié, toutes exploitations confondues. Une moyenne qui cache néanmoins une grande variabilité, selon l'année et le secteur d'activité […]. Ainsi, les 20 % d'exploitations ayant les résultats économiques les plus faibles ont un RCAI inférieur à 6 100 € par ETP non salarié tandis que les 20 % d'exploitations ayant les résultats économiques les meilleurs ont un RCAI supérieur à 54 100 € par ETP non salarié. Sur la même période, les exploitations d'élevages de ruminants ont présenté les revenus moyens annuels les plus faibles (par exemple 20 200 € par ETP non salarié en élevage de bovins viande). Les revenus sont en général plus élevés dans les productions végétales, atteignant par exemple 56 300 € par ETP non salarié en grandes cultures en moyenne sur la même période. […] Toutes spécialisations confondues, [les aides de la politique agricole commune] ont ainsi représenté en moyenne 64 % du RCAI sur cette période. Sur cette même période, les aides de la PAC* ont ainsi représenté seulement 22 % du RCAI en maraîchage, secteur peu soutenu, mais 65 % en élevage de bovins lait, 78 % en céréales et oléo-protéagineux, et jusqu'à 210 % en élevage de bovins viande. »[2]

En 2021, selon les données du recensement agricole[3], 95% des agriculteurs travaillent 40h ou plus par semaine, 75% n'ont pas de repos pendant 48h consécutives dans la semaine. 85% d'entre eux sont exposés à des contraintes physiques intenses comme rester longtemps dans une posture pénible ou fatigante, porter ou déplacer des charges lourdes et 71% sont exposés à des risques physiques comme l'exposition à du bruit intense ou la respiration de poussières. C'est une proportion très largement supérieure aux autres professions évaluées.

D'autres voies sont possibles et des mesures politiques pourraient changer radicalement les conditions de travail et de revenu des agriculteurs. Il faut conditionner les aides de la politique agricole commune (PAC*) non plus en fonction de la surface exploitée mais en fonction du nombre de personnes qui travaillent sur les fermes : il faut subventionner l'emploi plutôt que les machines et les hectares !

-        Il faut réguler les marchés en fixant des prix aux produits agricoles qui doivent être au niveau du coût de revient pour les agriculteurs, c'est-à-dire qui couvrent leurs charges de production et leur travail ! Il faut sortir des accords de libre-échange qui troquent la viande, le blé, le miel contre des voitures ! La nourriture n'est pas un produit financier parmi d'autres sur lequel on peut spéculer sur le dos des agriculteurs non rémunérés !

-        Il faut soutenir les démarches comme les AOP*, les AOC*, les labels de qualité, l'agriculture biologique, qui permettent d'assurer la qualité et les prix des produits pour les agriculteurs.

-        Il faut aider financièrement et techniquement les agriculteurs à salarier sur les fermes et rendre le métier plus attirant et plus vivable, moins pénible, que ce soit pour favoriser des installations nombreuses de paysans et paysannes mais aussi pour susciter des vocations d'employé agricole : il faut du monde dans les campagnes pour faire vivre les fermes, mais aussi les commerces et les écoles dans les villages !

Le Comité de la Confédération Paysanne de l'Indre



[1] Le résultat courant avant impôt est calculé à partir de l'ensemble des produits et des aides moins l'ensemble des charges et consommations de la ferme, auxquels on ajoute les produits financiers et on retire les amortissements et les intérêts des emprunts. C'est un indicateur pertinent de la capacité des fermes à générer du revenu pour les agriculteurs, qui ne se payent pas toujours un salaire mensuel fixe.

 
NOUS CONTACTER Confédération paysanne de l'Indre
02 54 61 62 40 - contact@confederationpaysanne36.fr